Haïti, quatre décennies de croissance faible et erratique
Haïti,
quatre décennies de croissance faible et erratique
Dans un
document de la Banque de la République d’Haïti sorti en juin 2017 dénommé
« Un Agenda Monétaire pour la Croissance et l’Emploi », divise en
quatre chapitres qui sont : Cadre d’analyse de la problématique de la
croissance en Haïti, La problématique de la croissance en Haïti, Analyse des
programmes économiques et financiers : retombées pour la croissance et Les
contours d’une politique monétaire pro-croissance. La Banque Centrale fait état
de l’échec des politiques macroéconomiques visant la croissance économique dans
l’économie nationale sous la période allant de 1970 à 2016.
Par une analyse des
programmes économiques et financiers qui ont été appliqué dans l’économie sur
les quatre (4) décennies, la Banque de la République D’Haïti (BRH) a fait le
constat amer des retombées de ces politiques sur la croissance de l’économie
nationale.
Trente-six (36) ans
d’une croissance moyenne annuelle négative (-1,35%) du Produit intérieur brut(PIB)
par tête d’habitant. La dynamique démographique de notre société jeune et
prolifique a conduit à un déficit cumulé de croissance de l’ordre de 50,13%.
D'après le document, l’économie haïtienne
s’est retrouvée enlisée dans une spirale de faible croissance économique accentuée
par des épisodes de chute caractérisée du produit intérieur brut (PIB). Haïti, sans être en situation de guerre, se retrouve sur un
sentier de croissance quasi-nul sur une période accomplie de trente-six (36)
ans. Une situation statistiquement confirmée par une ligne de tendance du PIB
de pente nulle jusqu’en 2011 et un taux moyen de croissance de 0,5% sur
l’ensemble de cette période.
Les quatre décennies
de croissance anémique ont cassé les ressorts d’une économie dont les bases de
production, principalement primaires, ont failli à s’adapter aux exigences des
politiques publiques orchestrées à la faveur du changement de paradigme des
années 80. Les préoccupations se sont plus ou moins exprimé dans les politiques
mais à chaque fois la croissance n’était pas au rendez-vous.
Le chômage endémique
et la spirale de pauvreté (50% de la population avec moins de 1 US par jour)
sur les quatre décennies en disent beaucoup sur l’échec des politiques
économiques y compris les programmes de stabilisation qui ont précédé le
programme d’ajustement structurel de 1987.
Les
manifestations de la crise majeure du modèle social dual d’organisation de la
production du début des années 80 dans lequel les fondements de l’économie
haïtienne sont restée figées dans leur configuration est la principale cause de
la crise globale que connait le système actuel. La venue de la mise en œuvre
d’un projet politique nouveau se fait toujours attendre.
Les politiques
macroéconomiques sur la période se sont greffées sur une économie duale et un
modèle de production tributaire des aléas climatiques depuis les années
70. Les fruits de l’activité économique étaient dirigés vers la capital
et les grandes villes, la sphère rurale qui arbitrait les principaux espaces de
production est négligé. La période de croissance qui a précédé les chocs des
années 80 s’est déroulée sur fond de désarticulation des structures de
l’économie. Le développement de l’industrie d’assemblage a permis d’augmenter
l’emploi au sein de la main d’œuvre non qualifié mais sa contribution est loin
d’être significative sur la croissance. Les principales activités souffrent
d’un ancrage dans l’économie. L’effet d’entrainement sur les autres secteurs de
l’économie est absent.
Le désenclavement des
zones de production en milieu rural a accentué l’inégal partage des fruits de
la croissance. Le modèle dual d’organisation de l’activité, phénomène débuté
avec la croissance des années 80, a étouffé la croissance.
Le document « Un
agenda monétaire pour la croissance et l’emploi » soutient que ce modèle est à
l’origine de la persistance d’un niveau de croissance faible que connait
l’économie sur toute la période. La crise majeure du modèle a donné lieu à des
manifestations d’ondes de chocs multiples. Ces chocs se manifestent à travers
de multiples crises qui dessinent une trappe à la croissance faible tels
que :
-
Une crise d’un environnement spatial désarticulé où viennent se greffer une
crise écologique, crise agricole, crise d l’habitat et crise
d’urbanisation ;
-
Une crise d’un environnement institutionnel déficient qui trouve son écho dans
l’état actuel de la gouvernance, instabilité politique, la concentration
exacerbe des marches des produits importés ;
-
Une crise d’un environnent macroéconomique fragilise par une dominance fiscale
forte qui essouffle la politique monétaire, enfonce le déficit du compte
courant de la balance des paiements et limite les investissements en
infrastructures économiques et sociales.
Selon la Banque
Centrale, la problématique de la croissance en Haïti est multiforme dans les
causes qui procèdent à sa manifestation la plus profonde : la spirale
d’une croissance faible et erratique.
Le contexte social
dans lequel s’évolue les politiques macroéconomiques en disent beaucoup sur son
échec ; l’instabilité politique et les cycles électoraux qui ont ralenti
l’activité économique. Les épisodes de chocs exogènes comme l’embargo après le
coup d’état de septembre 1991. Les évènements ont fini par créer une perception
de l’environnement de production et des affaires à la logique d’une
prédisposition à la croissance faible et erratique.
Ces trois dernières
années, le taux de croissance en moyenne annuelle a été de 1,8%. Les politiques
publiques ont donné des résultats non satisfaisant. Le déficit public s’est
accentué. Les secteurs porteurs de la croissance n’ont pas pu permettre la
promotion des exportations et une augmentation de la production locale. Le
déficit de la balance de paiement s’est accentué. Avec le déséquilibre interne
et externe, l’inflation et le change ont connu une poussée à la hausse. La
gourde a perdu près de 50% de sa valeur.
Toujours d’après le
document, cette situation est le résultat de facteurs structurels profonds qui
trouvent leur origine dans les conditions historiques et économiques qui ont
prévalu à la formation sociale du pays, elle est devenue un phénomène total qui
touche la quotidienneté précaire et le futur chancelant de l’haïtien. Elle
impose une réflexion de dimensions et de natures diverses (structurelle,
sociale, institutionnelle, démographique, politique et environnementale) qui
viendront alimenter la réflexion pour l’action.
Le gouverneur de la
Banque de la République D’Haïti (BRH), Jean Baden Dubois, croit à une nouvelle
approche de la croissance. D’après lui, la vision qui en découle devra
mettre l’emphase sur le secteur productif, à fort potentiel de valeur ajoutée
et à effet multiplicateurs, tout en évitant le cercle vicieux d’une croissance
faible qui viendrait exacerber les déséquilibres macroéconomiques et forcer
l’effort des politiques publiques essentiellement vers la stabilisation ;
la croissance économique durable restant, encore une fois, au stade d’objectif
secondaire.
Il ne s’agit pas de
revenir aux politiques dirigistes d’avant 1980, dit-il. Il ne s’agit pas non
plus de perdre de vue la mission fondamentale de toute banque centrale,
laquelle est d’assurer la stabilité des prix. Il s’agit, en tirant des leçons
de l’expérience économique haïtienne des quarante (40) dernières années, de
placer la croissance économique au centre des réflexions et d’utiliser tous les
moyens à la disposition de la BRH et des autres secteurs concernés afin de
placer l’économie sur un sentier de croissance soutenue et inclusive
Anderson Tibeaud
Economiste
tibanderson92@gmail.com
3314-3317
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