Réflexion sur l’importance de la programmation pour les sciences économiques : “De la nécessité d’une vraie hybridation”





Depuis ces deux dernières décennies, le numérique est en constante expansion sur toutes les économies du globe. Et de nombreuses études conduits mettent en lumière son niveau d’importance comme un des principaux facteurs de croissances des pays développés. Et c’est dans cette dynamique que les grandes revues économiques nord-américaine sortent régulièrement des publications sur cette thématique. Tout récemment “The Economist” a publié un article consacrant Python comme l’un des langages de programmation le plus connu dans le monde. Et ce langage, comme bien temps d’autre, simplifie et pousse les frontières de la computation numérique utilisée dans plusieurs domaines en particulier par les disciplines scientifiques. Et certainement dans le cas qui nous intéresse les sciences économiques. Dans cet ordre d’idées, ne serions-nous pas en droit de faire le point sur la nécessité d’adapter notre matrice de formation pour les nouvelles générations d’économistes par rapport à ces nouveaux savoir-faire en vigueur dans le monde ?


C’est bien triste de parler d’adaptation alors qu’on aurait dû être dans la pratique et l’approfondissement. Les sciences économiques sont classées parmi les sciences humaines et sociales. Elles sont une hybridation de ce que l’on appelle par convention de sciences molles et de sciences dures (mathématiques et statistiques). Cependant dans beaucoup de Centre universitaire du pays, la 2eme partie est rejetée à tort ou du moins est très mal dispensée. De ce fait, un problème fondamental se pose. Ces matières ont pour objectif de doter l’économiste de capacité d’abstraction, de modélisation et de prévision indispensable à la conduite de bonnes recherches empiriques devant infirmer ou confirmer les théories posées pour expliquer des phénomènes complexes de la réalité. Et dans une optique plus profonde, elles leur permettront d’établir de nouvelles théories à partir de leurs propres recherches qu’ils seront appelés à conduire. Néanmoins il ne faut pas faire de fausse généralisation. Il existe bien certains centres qui ont le souci d’enseigner l’aspect dur de la discipline pour offrir consciencieusement une solide formation à nos étudiants. Mais malheureusement ils font plusieurs formes d’omissions cruciales à ce niveau.

Une première forme d’omission réside au niveau du choix et de la pratique des programmes-logiciels utilisés, bien évidemment dans les cas où ils sont actuellement enseignés. En effet, il existe un bon nombre de programme-logiciel ayant des applications dans des champs divers. On peut les classer en plusieurs groupes. D’une part, vous avez ceux qui sont strictement conçus pour la computation numérique et la statistique computationnelle dit numerical computing and statistical computing tels que : Eviews, Spss, R et consort. D’un autre côté vous avez ceux qui ont la capacité de faire les deux mais au prime abord n’était pas conçu pour. A titre d’exemple nous ne citerons ici que Python. Maintenant la plupart des centres préfèrent choisir d’enseigner Eviews en complément du cours d’économétrie et dans certain cas Spss pour d’autres cours de statistique. De plus ils ont généralement un cours d’informatique marginalisé car doté d’un cursus inadéquat. En effet, ils ne font qu’un survol des rudiments d’Excell, des choses devant déjà être vues depuis la terminale. Et dans des cas plus extrêmes on vous enseigne Java, un programme-logiciel très difficile de par sa syntaxe complexe et qui est conçu pour le développement d’application. Quoique cela aurait tout son sens si, tout comme pour le cas de Python, au moins le curriculum du cours était axé sur l’analyse de donnée. Mais malheureusement ce n’est pas le cas, en témoigne, les travaux de fin de session consiste à développer un jeu ou une application quelconque. Ce qui bien évidemment ne rentre pas en adéquation avec la mission de ces universités. Il existe un bon nombre de matériel didactique et audio-visuel pour monter un cursus pour orienter java vers l’analyse numérique, de la modélisation et de l’analyse de donnée. Et on aurait en conclusion, dans ce cas-ci, un cours d’informatique très pratique pour les sciences économiques.

La deuxième forme d’omission réside dans la méthodologie d’enseignement des logiciels-programmes choisies traditionnellement. C’est-à-dire Eviews, Spss et on peut même y ajouter Excell (de notre cours d’informatique). Effectivement ces trois logiciels, comme la plupart des logiciels conçus, combinent une approche menue dit Graphique User Interface et une approche console dit Text User Interface. Ainsi dans la recherche de la facilitation de l’utilisation optimal de toutes les fonctionnalités du programme, l’approche menue est développée suivant la philosophie du wysiwyg : what you see, is what you get. Elle est suivie férocement par les programmeurs de Microsoft Windows. Cependant cette approche présente un handicap tel le handicap de la tour ou du bouffon. Ce qui veut dire tout comme un jeu d’échec, on est limité par les règles du jeu régissant le comportement des pièces du jeu. Donc par analogie, On est limité tout naturellement par le menu tel qu’il est défini dès la conception du logiciel. Et conscient de cela, les concepteurs ajoutent l’approche console et y attache un langage dit de programmation propre à ce logiciel pour donner flexibilité et un niveau de contrôle à l’utilisateur pour définir de nouvelles règles. Malheureusement ces centres universitaires n’ont pas été à la hauteur et ont failli les étudiants. Car l’approche menue leur a été uniquement proposé ignorant avec une facilité insoupçonnable l’approche console.

Comme toute action entraine une réaction égale et opposée, la conséquence est fatale et immédiate. Par ce modus operandi en vigueur dans nos centres, nous ne faisons que produire des économistes à demi-aveugles. Et si vous voulez en tant que nation, consciemment, avoir des économistes ineptes à la réflexion sérieuse, des plagiaires de rapports et d’études conduit par les organisations internationales. Si vous voulez uniquement des calculateurs de taux de change, de taux d’inflation ou bien des animateurs d’émissions de radio sensés traiter de sujet économique sans aucune capacités d’analyse prédictive basée sur des données propres au système Haïtien. Nous n’avons qu’à continuer dans cette voie. Mais si nous voulons de solides économistes, il nous faut inexorablement aborder et maitriser l’approche console dans nos cours. Et dans cet ordre d’idée, je proposerais à ces centres l’apprentissage de R et de Python pour plusieurs raisons. Ils sont de loin beaucoup plus puissant qu’Eviews parce qu’ils ont plus de champs d’application. Ils sont gratuits et ont une solide communauté dédiée au développement des paquets ou librairies pour la modélisation, la statistique, la visualisation et l’analyse de données (dans le cas qui nous intéresse). Ensuite ils sont conçus à dominance Text User Interface certes mais ils ont des éditeurs de texte qui ramène l’approche menu et nous donne un environnement plus convivial pour travailler. Pour finir, la raison la plus importante, leurs syntaxes ou le langage en soi est simple et intuitif. Autrement dit, ils se laissent apprendre facilement et sont facile d’utilisation. De plus il faut ajouter qu’il existe une batterie très développée de documentation et d’élément audio-visuel sur tous les besoins d’utilisation.

Nous avons bien tout à gagner en franchissant ce pas. Nous aurons des économistes capables de modéliser les phénomènes complexes de la vie Haïtienne ou mondiale sans l’aide d’un expert venant de nos partenaires techniques et financiers. Car ne vous y tromper pas, les organisations internationales (nos partenaires) utilisent, entre autres, ces deux programmes-logiciels au niveau de leurs divisions statistiques pour faire des modèles et des prédictions sur les différents pays où ils sont présents. Et vous pouvez faire ce constat en observant de près leurs pages WEB. Donc on ne peut pas se permettre en tant que nation d’offrir à nos économistes une formation au rabais. Nous nous devons d’embrasser pleinement cette nature hybride qui est le socle de la profession. Il est grand temps que nous nous mettons à faire des choses sérieuses. Et pour répéter un professeur, qui m’est cher : " Les choses sérieuses ne sont jamais faciles. Il s’en va de la survie d’une nation de ne point se complaire dans cette facilité pour faire les choses, comme elles doivent être faites le plus normalement du monde. "



                                                                        
CTPEA / Promotion 2010-2014
Alexandro Disla
Economiste
alexandrodisla@hotmail.com




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